Au service des films et des publics.
Si toute l’année, nous attirons et accueillons des tournages de films, nous participons à l’animation de la filière professionnelle, nous dressons des passerelles entre les films et les salles de cinéma, une de nos priorités est que les films liés au territoire soient montrés, étudiés, analysés par des élèves de tout âge.
Alors que les tournages se succèdent, que les sorties en salles s’enchaînent, pouvoir ralentir la vie d’un film est une satisfaction et donne aussi un sens supplémentaire à notre travail.
Et lorsqu’un film est projeté à des étudiants, lesquels avec leur enseignant mènent un travail approfondi à la hauteur de la qualité et de l’ambition artistique de l’oeuvre, nous nous devons de valoriser ces productions, pour les partager avec le plus grand nombre. La richesse du film d’Alain Guiraudie se mesure – s’il en était besoin – aussi à la richesse des réflexions et textes qu’il suscite.
Ce site rejoint les autres contenus qu’Occitanie films peut valoriser et transmettre, grâce aux soutiens de ses tutelles, Région Occitanie Pyrénées-Méditerranée et DRAC Occitanie (Ministère de la Culture), ainsi, nous pouvons être au service des films et des publics.
Karim Ghiyati, Valentine Pignet
Occitanie films
Rester animal, végétal, minéral, littéral, radical…
Par Vincent Deville
Pendant l’année universitaire 2018-2019, cinquante étudiants inscrits dans les diplômes « Master 2 Recherche » et « Master 2 Métiers de la production » en Cinéma et Audiovisuel de l’Université Paul-Valéry Montpellier 3 ont participé à un projet d’analyse plurielle du film Rester vertical (2016) d’Alain Guiraudie.
Plutôt qu’un cours classique d’analyse de film que j’aurais moi-même dispensé, j’ai proposé aux étudiants qu’ils mènent eux-mêmes le travail par groupes, selon des entrées et des axes qui leurs étaient propres. L’enseignant s’est donc transformé en coordinateur de projet, les cours en séances de travail, l’examen en production de ressources avec pour finalité une restitution publique (précisément sur ce site). Pour la quasi-totalité de ces étudiants, le Master 2 est l’aboutissement des études universitaires, la fin d’un cycle avant de se lancer dans des projets professionnels et/ou personnels. Il s’agissait donc de demander aux étudiants de mettre à profit tout ce qu’ils avaient pu engranger tant en termes de connaissances que de compétences, aussi bien sur le versant du savoir que du sensible.
Par analyse plurielle, on peut comprendre une série d’analyses qui recourent à des approches, des méthodes, des outils différents tout en étant complémentaires. Ainsi, on retrouvera dans les travaux des étudiants aussi bien des analyses économiques, techniques, esthétiques, sociologiques, culturelles, qui dialoguent et s’enrichissent mutuellement, ces dimensions n’étant elles-mêmes jamais cloisonnées dans les processus de création.
Ce projet s’est déroulé comme suit : la découverte du film par une projection en salle, sans accompagnement ni débat public, afin de laisser chacun repartir avec le film et sa propre appréhension ; la mise à disposition de ressources (documents de production, revue de presse, bibliographie…) ; une première séance de travail pour imaginer tous les axes d’analyse possibles ; la constitution d’une quinzaine de groupes de travail ; une rencontre avec Roy Genty, directeur artistique sur le film et proche collaborateur d’Alain Guiraudie, puis lors d’une autre séance avec l’acteur Damien Bonnard, rôle principal du film, qui ont passé l’un et l’autre près de quatre heure à partager leur expérience avec les étudiants ; l’exposé par chaque groupe d’un avant-projet, complétés de ma part par quelques points théoriques ou d’analyse. Après ces six séances de travail de quatre heures chacune de novembre à décembre 2018, les étudiants ont travaillé par groupes, en échange avec moi jusqu’en février 2019, de manière à rendre leur travail publiable. Dans une parfaite complémentarité, ce sont ensuite des étudiants du Master 2 Métiers du livre et de l’édition de l’Université Paul-Valéry Montpellier 3 qui ont repris le flambeau à l’automne 2019, afin d’assurer le travail éditorial et de mise en ligne, ici accessible aujourd’hui.
Mais encore fallait-il trouver le film qui se prêterait à un tel projet ! Le premier critère a été factuel : un film aidé par le fonds d’aide régional (à l’époque Languedoc-Roussillon), qui permettrait un accès plus facile aux documents et aux équipes, et une visibilité sur le site d’Occitanie Films. Un film ensuite qui permettrait des approches plurielles, notamment par sa diversité thématique. Quel objet d’étude plus idéal qu’un film qui parlerait à la fois de la réintroduction du loup et des difficultés du pastoralisme, d’un questionnement de l’instinct maternel, de mono-parentalité, de pan-sexualité et de sexualité intergénérationnelle, de suicide assisté, des difficultés de la création artistique, tout cela dans un genre oscillant entre le réalisme et le conte, touchant aux limites de la représentation (la naissance, le sexe et la mort) par un cinéaste en plein changement de régime et d’échelle de production ? Enfin, un film suffisamment intéressant, intelligent, complexe, ambivalent qui puisse précisément « résister » à l’analyse et ne pas s’écrouler sous les questions qui allaient lui être posées. Avec ses images animales, végétales, minérales, parfois littérales et souvent radicales, Rester vertical a été pour nous ce film idéal !
Je tiens à remercier tout particulièrement : Arnaud Clappier (Cinéma Utopia) pour l’accueil de la projection ; Karim Ghiyati et Valentine Pignet (Occitanie Films) pour le soutien et l’aide à réaliser ce projet ; Roy Genty et Damien Bonnard pour leur disponibilité et leur générosité dans les rencontres et les échanges avec les étudiants, ainsi que tous les autres collaborateurs artistiques d’Alain Guiraudie qui ont bien voulu prendre le temps de répondre aux questions des étudiants ; Corinne Saminadayar-Perrin, responsable du Master 2 Métiers du livre et de l’édition de l’Université Paul-Valéry Montpellier 3 ; Valentin Cazaudebat (coordinateur), Pierrinne Capelle et Candyce Metevola, étudiants du Master 2 Métiers du livre et de l’édition, pour la mise en ligne du projet ; Pietsie Feenstra et Sarah Hatchuel, responsables du Master 2 Recherche Cinéma et Audiovisuel de l’Université Paul-Valéry Montpellier 3 pour leur soutien ; les étudiantes et étudiants du projet pour leur investissement sans failles et la qualité du travail accompli.
Vincent Deville
Maître de conférences en Études cinématographiques
Co-responsable du Master 2 Métiers de la production cinéma et audiovisuel
Université-Paul Valéry Montpellier 3
Unité de recherche Rirra 21 (Représenter Inventer la Réalité, du Romantisme Au XXIe siècle)